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fut terminée. Le vicomte se leva et se plaça debout, bien en face de moi. « Vous avez raison, monsieur, me dit-il, si ces lettres sont bien de mon père, comme je le crois, tout tend à prouver que je ne suis pas le fils de la comtesse de Commarin. » Je ne répondis pas. — « Cependant, reprit-il, ce ne sont là que des présomptions. Possédez-vous d’autres preuves ? » Je m’attendais, certes, à bien d’autres objections. — « Germain, dis-je, pourrait parler. » Il m’apprit que Germain est mort depuis plusieurs années. Alors, je lui parlai de la nourrice, de la veuve Lerouge. Je lui expliquai combien elle serait facile à trouver et à interroger. J’ajoutai qu’elle demeurait à la Jonchère.

— Et que dit-il, Noël, à cette ouverture ? demanda avec empressement le père Tabaret.

— Il garda le silence d’abord et parut réfléchir. Puis, tout à coup, il se frappa le front en disant :

— « J’y suis, je la connais ! J’ai accompagné mon père chez elle trois fois, et devant moi il lui a remis une somme assez forte. » Je lui fis remarquer que c’était encore une preuve. Il ne répliqua pas et se mit à arpenter la bibliothèque. Enfin, il revint à moi. — « Monsieur, me dit-il, vous connaissez le fils légitime de M. de Commarin ? » — Je répondis : — « C’est moi. » Il baissa la tête et murmura : — « Je m’en doutais. » Il me prit la main et ajouta : — « Mon frère, je ne vous en veux pas. »