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rappelait un peu la fine serrurerie, l’intéressait vivement.

— Que faites-vous là ? demanda-t-il.

— Voyez, nous faisons des ressorts de montre. Dans nos montagnes on fabrique les différentes pièces des montres, de sorte qu’à Besançon on n’a plus qu’à les assembler pour faire la montre même. Moi, je fabrique des ressorts, d’autres font les petites roues, les petites chaînes qui se trouvent à l’intérieur, d’autres les cadrans émaillés où les heures sont peintes, d’autres les aiguilles qui marqueront l’heure ; d’autres enfin façonnent les boîtiers en argent ou en or.

— Que tout cela est délicat, dit André, et quelle attention il vous faut prendre pour manier cet acier entre vos doigts ! Je m’en fais une idée, moi qui suis serrurier.

LE TRAVAIL DU SOIR DANS UNE FERME DU JURA. — C’est dans les fermes du Jura que se fabriquent en grande quantité les ressorts de montre les plus délicats. En passant près des fermes, il est rare qu’on n’y entende pas le bruit du marteau ou de la lime. — Le métier à bas, auquel travaille la fermière de droite, a été inventé par un Français, un ouvrier serrurier des environs de Caen. Avec ce métier on fabrique bien plus vite qu’avec la main, des bas presque aussi solides.


— C’est assez délicat, en effet : soupesez ce ressort et voyez comme il est léger. Avec une livre de fer, on peut en fabriquer jusqu’à 80,000, et quand ils sont bien réussis, ils valent jusqu’à 10 francs chacun.

— 10 francs chaque ressort ! dit André. S’il y en a 80,000, cela fait 800,000 francs, et tout cela peut se tirer d’une livre de fer qui coûte si peu ! Mon patron serrurier avait bien raison de dire que ce qui donne du prix aux choses, c’est surtout le travail et l’intelligence de l’ouvrier.