Page:G. Bruno - Le Tour de la France par deux enfants, 1904.djvu/307

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— En même temps, il regardait les petites filles de Guillaume : — N’aimez-vous pas la France ? leur dit-il ; oh ! moi, de tout mon cœur j’aime la France.

Et dans la joie qu’il éprouvait de se voir enfin une patrie, une maison, une famille, comme le pauvre enfant l’avait si souvent souhaité naguère, il s’élança dans la cour de la ferme, frappant ses petites mains l’une contre l’autre ; puis, songeant à son cher père qui aurait tant voulu le savoir Français, il se mit à répéter de nouveau à pleine voix : — J’aime la France !

« J’aime la France !… la France… France…, » répéta fidèlement et nettement le bel écho de la colline, qui se répercutait encore dans les ruines de la ferme.

Julien s’arrêta surpris.

— Tous les échos te répondent l’un après l’autre, Julien, dit gaîment André.

— Tant mieux, s’écria le petit garçon, je voudrais que le monde entier me répondît et que chaque pays de la terre dît : « J’aime la France. »

— Pour cela, reprit l’oncle Volden, il n’y a qu’une chose à faire : que chacun des enfants de la patrie s’efforce d’être le meilleur possible ; alors la France sera aimée autant qu’admirée par toute la terre.

____


Six ans se sont écoulés depuis ce jour. Ceux qui ont vu la ferme de la Grand’Lande à cette époque ne la reconnaîtraient plus maintenant.

Pas un mètre de terrain n’est inoccupé, et la jachère y est inconnue ; le sol travaille sans cesse : aussitôt les céréales moissonnées, la charrue retourne les sillons, et de nouveau on ensemence la terre en variant les cultures avec intelligence. Grâce aux riches prairies de trèfle et de luzerne, le fourrage ne manque jamais à la ferme. Au lieu de six vaches qu’elle nourrissait avant la guerre, la terre de la Grand’Lande en nourrit douze, sans compter trois belles juments dont les poulains s’ébattent chaque année dans les regains des prairies. C’est vous dire qu’avec tous ces animaux l’engrais ne manque pas, et que chaque année la terre, au lieu de s’appauvrir, va s’améliorant.