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son ami Guillaume, il savait si bien tenir sa parole qu’il revint de lui-même se remettre prisonnier, après avoir dépensé sa rançon pour la liberté de ses camarades.

— Allons, Julien, dit l’oncle Frantz, tu lis avec profit, mon enfant, puisque tu comprends bien tes lectures. Tâche de ne pas les oublier à présent. Car rien n’encourage mieux à devenir un honnête homme que de se souvenir des belles actions de ceux qui ont vécu avant nous.



XCIV. — Les grands hommes du Maine, de l’Anjou et de la Touraine. Le chirurgien Ambroise Paré. Le sculpteur David. Le savant philosophe Descartes.


« Plus on avance dans la science, plus on s’aperçoit combien on ignore encore de choses, et plus on devient modeste. » DESCARTES.


Le lendemain, Julien n’eut pas le plaisir de causer avec son ami Guillaume ; la mer était redevenue mauvaise et le vieux pilote était trop occupé pour faire la conversation.

— Assieds-toi tranquillement, mon Julien, dit André au petit garçon, cela vaudra mieux que de courir sur le pont pour embarrasser la manœuvre et risquer d’être emporté par les lames, qui sont fortes.

— Oui, André, répondit l’enfant, je vais m’asseoir dans un petit coin et m’amuser à lire tout seul pour ne déranger personne. — Et Julien, tirant de sa poche son livre, qui ne le quittait jamais, l’ouvrit à la page où il en était resté la veille. Il lut ce qui suit :


I.   Il y a, à l’est de la Bretagne, deux fertiles provinces qui semblent la continuer, et qui sont arrosées aussi par la Loire ou ses affluents : c’est le Maine et l’Anjou.

Le Maine produit des chanvres et des lins, dont on fait dans le pays des toiles renommées. Les chevaux et les volailles du Maine sont d’excellente race ; le pays est boisé, et le gibier y abonde.

C’est dans le Maine, près de Laval, que naquit le célèbre chirurgien Ambroise Paré. Il jouait un jour avec de jeunes villageois de son âge, et tous ces enfants couraient et sautaient ensemble. Tout d’un coup, l’un d’eux tomba et ne put se relever. Il s’était fait une grave blessure à la tête, et le sang coulait en abondance. Tous ses camarades, sottement effrayés à la vue du sang et le croyant mort, se mettent à fuir en criant. Seul le petit Ambroise, à la fois plus courageux et plus compatissant, s’approche de son camarade, lui lave sa plaie, la bande avec son mouchoir ; puis, comme l’enfant pouvait à peine se remuer, il le charge sur ses épaules et le transporte chez ses parents.

Cette présence d’esprit et cette fermeté de caractère furent bientôt