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JEAN RIVARD

manteau, nos deux défricheurs s’occupèrent à sarcler la forêt, c’est-à-dire, à faire disparaître tous les jeunes arbres qui devaient être soit déracinés soit coupés près du sol ; ils purent ainsi nettoyer une étendue de dix à douze arpents autour de leur cabane, ne laissant debout que les grands arbres qui pouvaient être facilement abattus durant les mois d’hiver.

Ce n’était pas chose facile pourtant que de faire disparaître de cette surface les végétaux géants qui la couvraient encore, et qu’il fallait couper à une hauteur d’environ trois pieds du sol. Plusieurs de ces arbres étaient, comme on l’a déjà dit, d’une dimension énorme, quelques-uns n’ayant pas moins de cinq à six pieds de diamètre. Ajoutons qu’il fallait travailler au milieu des neiges et que souvent un froid intense obligeait bon gré mal gré nos vaillants défricheurs à suspendre leurs travaux.

Néanmoins, et en dépit de tous les obstacles, dès le commencement du mois de mars suivant, dix arpents de forêts avaient été abattus, ce qui, joint aux cinq arpents nettoyés dans le cours de l’automne précédent, formait quinze arpents de terre nouvelle que Jean Rivard se proposait d’ensemencer au printemps. Les grands arbres étendus sans vie sur la terre froide ou sur un lit de neige avaient été dépouillés de leurs branches et coupés en plusieurs parties. Il ne restait plus qu’à réunir en monceaux, arbres, branches, broussailles, arbustes, puis d’y mettre le feu ; et cette opération, que les colons appellent dans leur langage « tasser ou relever l’abattis » ne pouvant se faire qu’après la fonte des neiges, nos défricheurs furent forcés de laisser reposer leurs haches. Ils purent cependant employer les