Page:Gérin-Lajoie - Jean Rivard, le défricheur, 1874.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.
37
LE DÉFRICHEUR.

ron, meublier, menuisier ; mais comme il remplissait toutes ces diverses fonctions gratuitement, et pour ainsi dire à temps perdu, on ne pouvait l’accuser de cupidité, et jamais fonctionnaire ne donna une satisfaction plus complète.


VIII.

les défrichements.


Jean Rivard se rappelait le précepte : ne remets pas à demain ce que tu peux faire aujourd’hui : aussi à peine l’Aurore aux doigts de rose avait-elle ouvert les portes de l’Orient, comme dirait le bon Homère, que nos deux défricheurs étaient déjà à l’œuvre.

Ils commencèrent par éclaircir et nettoyer les alentours de leur cabane ; en quelques jours, les arbrisseaux avaient été coupés ou arrachés de terre, les « corps morts »[1] avaient été coupés en longueurs de huit à dix pieds, réunis en tas et brûlés ; les grands arbres seuls restaient debout, trônant çà et là, dans leur superbe majesté.

Les grands arbres de la forêt offrent aux regards quelque chose de sublime. Rien ne présente une plus belle image de la fierté, de la dignité royale.

Cette vue rappelle involontairement à l’esprit la belle comparaison du prophète à l’égard des superbes :

Pareils aux cèdres du Liban
Ils cachent dans les cieux,
Leurs fronts audacieux.

  1. Dans le langage des défricheurs, les « corps morts » des arbres abattus par les ouragans ou par suite de vétusté.