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JEAN RIVARD

Quand je vous ai dit tout-à-l’heure, remarqua Jean Rivard, que ce jardin était l’œuvre de ma femme, j’aurais dû en excepter pourtant le labourage et le bêchage qui m’échouent en partage. J’aurais dû en excepter aussi la plantation, la taille et la greffe des arbres fruitiers que vous voyez, et qui sont exclusivement mon ouvrage. Je pourrai dire en mourant comme le vieillard de la fable :

Mes arrières neveux me devront cet ombrage.

Voyez ces deux pommiers qui depuis plusieurs années nous rapportent plus de pommes qu’il ne nous en faut. C’est moi qui, en les taillant, leur ai donné la forme élégante que vous leur voyez. Nos pruniers nous fournissent les meilleurs fruits qui se récoltent en Canada, et si vous passez dans quelque temps, nous vous ferons goûter d’excellentes cerises de France ; nous avons aussi des cerises à grappes. Vous voyez, en outre, des noyers, des pommeliers, des noisetiers, etc. J’ai été obligé d’étudier seul, dans mes livres, les moyens d’entretenir et d’améliorer tous ces différents arbres, et en particulier la greffe et la taille, et je crois que je ne m’en tire pas trop mal, tout en avouant volontiers que je suis loin encore d’être le parfait jardinier.

Rendus au fond du jardin, je fus surpris d’apercevoir plusieurs ruches d’abeilles :

— Voilà de petites maisons, me dit mon hôte, qui m’ont procuré beaucoup de jouissances. Il y a plusieurs années que je cultive les mouches à miel. Ces charmants petits insectes sont si laborieux, si industrieux, que leur entretien est moins un travail qu’un agrément. Il m’a suffi de semer dans les environs,