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JEAN RIVARD

nouveau labour. Le sol étant ainsi bien disposé à recevoir la semence, la récolte, comme vous voyez, ne m’a pas fait défaut.

« Ce champ de terre ainsi fumé se trouve assez riche maintenant pour n’avoir plus besoin d’engrais d’ici à six ans. L’année prochaine j’engraisserai le champ suivant et lui ferai subir toutes les façons qu’a déjà subies le premier. Dans deux ans, le troisième aura son tour, et ainsi de suite, jusqu’à ce que mes six champs aient été parfaitement fumés et engraissés.

— Mais, dis-je, pour engraisser quinze arpents de terre par année, il doit falloir un temps et un travail considérables ?

— Certainement, répondit-il ; mais c’est pour le cultivateur une question de vie ou de mort. Je déplore chaque jour la coupable insouciance d’un certain nombre d’entre nous qui laissent leur fumier se perdre devant leurs granges ou leurs étables. Ils ne comprennent pas que pour le cultivateur, le fumier c’est de l’or.

« Depuis que j’ai pu constater par mes propres calculs toute la valeur du fumier, ne craignez pas que j’en laisse perdre une parcelle ; au contraire, j’en recueille par tous les moyens possibles. »

Tout en parlant ainsi, nous avions passé le champ de foin d’où s’exhalait une senteur des plus agréables, et nous étions arrivés aux pâturages.

On y voyait quinze belles vaches, les unes de la race Ayrshire, d’autres de race canadienne, avec une demi-douzaine de génisses et un superbe taureau. On y voyait aussi quatre chevaux, un poulain et une trentaine de moutons.