Page:Gérin-Lajoie - Jean Rivard, économiste, 1876.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
JEAN RIVARD

tionnée, la vie ne lui semblait plus aussi rude. Lorsque, après cinq ou six heures de travail, il retournait à sa maison, et qu’il apercevait de loin sur le seuil de sa porte sa Louise qui le regardait venir, ses fatigues s’évanouissaient ; il rentrait chez lui l’homme le plus heureux de la terre.

Son habitation lui semblait un petit paradis terrestre.

Environ un ans après son mariage, par une nuit sombre et orageuse, une voiture partie de la maison de notre défricheur se rendit tout d’un trait à celle du père Landry, d’où elle ramena madame Landry. Et le lendemain matin on apprit que madame Rivard avait mis au monde un fils.

C’était pour les jeunes époux l’accomplissement de leurs vœux, le complément de leur bonheur. La mère désirant que son enfant fut baptisé sans retard, il fallut le transporter à trois lieues de là, au village de Lacasseville.

Il n’est pas besoin de dire que Louise se consacra tout entière au soin de son nourrisson. Pendant plus de trois mois il ne vécut que de son lait. Jour et nuit elle était attentive à ses besoins ; à son moindre mouvement, elle volait au berceau. Avec quel bonheur elle arrêtait ses yeux sur cette figure dont la beauté, aux yeux de la jeune mère, égalait celle des anges ! Avec quelle indicible jouissance elle le voyait chaque jour croître et se développer !

Ses beaux grands yeux noirs s’épanouirent peu à peu. Au bout de quelques semaines il commençait à sourire et à gazouiller, musique si douce aux oreilles d’une mère !

Que d’heures délicieuses les jeunes époux passèrent