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JEAN RIVARD

jamais ambitionné les honneurs, et cependant tu vas devenir un homme marquant. Tu es déjà le roi de ta localité. Qui sait si tu ne deviendras pas plus tard membre du parlement ? Oh ! si jamais tu te présentes, mon cher Jean, je veux aller dans ton comté haranguer les électeurs ; tu verras si je m’y entends à faire une élection. En attendant, voici une faveur spéciale que je sollicite de toi : quand tu n’auras rien de mieux à faire, écris moi donc une longue lettre, comme tu m’en écrivais autrefois, dans laquelle tu me feras connaître minutieusement tous les secrets de ta prospérité. Tu sais que Montesquieu a fait un livre sur les Causes de la grandeur des Romains ; eh bien ! je voudrais en faire un, à mon tour, sur les Causes de la grandeur de Jean Rivard. Pour cela, il faut que tu mettes toute modestie de côté, et que tu me fasses le confident de tes secrets les plus intimes.

« Ta dernière lettre m’en dit bien quelque chose mais cela ne suffit pas.

« J’ai déjà entendu dire que ton ancienne fille Françoise te regardait un peu comme sorcier. J’aimerais à savoir jusqu’à quel point elle a raison.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il est un autre sujet sur lequel il était difficile à notre jeune avocat de ne pas dire un mot. Aussi profite-t-il de l’occasion pour faire de nouvelles confidences à son ami :

« Il faut que je réponde maintenant à quelques points de ta dernière lettre.

« Tu me fais du mariage une peinture admirable ; je ne pouvais m’attendre à autre chose de ta part. Quand on a le bonheur d’avoir une femme comme