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« Dans le langage de Guillaume Quatre, "LE CANADA EST PERDU ET LIVRÉ", une multitude doit s’assembler sur la place-d’armes, ce soir, a huit heures.

« AU COMBAT, C’EST VOTRE TEMPS. »


L’appel incendiaire de la Gazette fut entendu. Entre sept et ■huit heures du soir, des attroupements se formèrent sur divers points de la ville, puis un hérault fut envoyé par les rues, une -cloche à la main, convoquant une assemblée sur le Champ de Mars. Des compagnies de pompiers se mirent à parcourir les rues, sonnant leurs cloches et faisant tout le bruit possible afin d’attirer une plus grande foule. A huit heures, douze à quinze cents personnes étaient réunies sur le Champ de Mars. Quelques orateurs populaires firent passer dans le cœur de ces gens la haine et la fureur dont ils étaient animés contre l’Assemblée législative, contre le ministère, et en particulier contre lord Elgin. A un signal •donné, cette populace laissa le Champ de Mars et se dirigea sur le parlement, où siégeaient en ce moment les représentants du peuple.

L’Assemblée législative en était à discuter tranquillement lé bill de judicature de M. La Fontaine, lorsque les hurlements se firent entendre. Un instant après, une grêle de pierres venait interrompre les délibérations. Plusieurs membres se précipitèrent vers la bibliothèque, d’autres autour du fauteuil de l’Orateur, quelques-uns voulurent faire bonne contenance et restèrent dans leurs fauteuils ; mais une seconde fois des volées de pierres beaucoup plus grosses, lancées cette fois avec une vigueur, une précision et un ensemble qui dénotaient une intention bien arrêtée de démolir l’édifice, entrèrent à la fois par les croisées des deux côtés, et il fut impossible de tenir plus longtemps. L’Orateur, tous les membres présents et les employés de la Chambre se réunirent dans l’espace étroit qui séparait la Chambre de la buvette. C’était le seul endroit de l’édifice où l’on fût à l’abri du feu croisé de projectiles que Ton continuait à lancer avec la même force et