Page:Gérard - La chasse au lion, 1864.djvu/283

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 285 —

féroce aussi puissante que lui peut-être : un rhinocéros, un éléphant, un tigre.

— Un tigre, en effet, poursuivit M. Young en nous montrant du doigt au loin un de ces dangereux promeneurs du désert qui venait de notre côté par bonds retentissants comme une cascade. Nous avions le cou tendu, nous respirions à peine, nos regards allaient sans cesse du lion au tigre et du tigre au lion toujours aux aguets. C’était déjà un terrible spectacle, car nous comprenions quelle en devait être l’issue.

Voici les deux adversaires en présence. Ils se sont vus, ils ne se quitteront plus désormais que l’un des deux ne soit un cadavre.

Le tigre était monstrueux par sa taille, magnifique par les lignes longues, noires et régulières qui zébraient son dos jaune vivement accentué ; sa gueule était béante, sa queue basse ainsi que sa tête, dont les yeux rouges lançaient de rapides éclairs. Nous n’étions séparés des adversaires que de deux cents pas tout au plus, le soleil le plus ardent les frappait à plomb, et nous ne perdions aucun de leurs mouvements ; notre cœur battait vite et fort, je vous jure.

Le tigre gagnait toujours du terrain, le lion immobile le laissait venir. Il y avait dans celui-ci le calme de la force, l’attitude de la puissance ; on croyait deviner chez celui-là les violents efforts de celui qui a assez de cœur pour affronter un péril imminent, et qui pourtant ne se flatte point de le vaincre. Sa mar-