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Il n’y a pas de place forte dans ce pays-là, et le canon de Ghelma ne tire qu’à midi. Levez-vous et allez vous asseoir en dehors du douar pour mieux entendre.

Jamais votre oreille n’a été frappée d’un son plus harmonieux, plus magnifique, plus imposant.

Attention, et ne perdez pas une note.

C’est un grand vieux lion arrivé dans la nuit, dont les soupirs ont ébranlé les montagnes.

Attendez un peu, il vient de quitter son repaire.

Il marche, les yeux à demi-fermés, il n’est pas encore bien éveillé.

Tout à l’heure il aura secoué sa paresse, et alors il rugira.

Les Arabes l’ont entendu, ils vous appellent de tous côtés, ils vous cherchent ; ces gens-là sont payés pour savoir ce que leur coûtera l’arrivée du maître.

Si vous les écoutiez, il faudrait partir à l’instant et tuer ce lion avant qu’il ait parcouru la moitié de ses domaines.

Ils viennent tous, petits et grands, s’accroupir autour de vous et écouter avec un silence religieux cette voix qui fait taire toutes les voix, cette voix qui vous dit la force et le courage du plus fort et du plus courageux sur la terre.