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— Que dix hommes, dit le cheik en arrivant, se portent en avant jusqu’à ce qu’ils ne trouvent plus de traces. Alors seulement ils s’arrêteront, gardant militairement les deux rives. Vous autres, enfants, pied à terre, et suivez un pistolet au poing, les pas de ces chiens, que vous m’amènerez vivants si vous le pouvez.

Je compris à cet ordre que c’en était fait de Lakdar : ma position étant meilleure que la sienne, je conservai l’espoir de lui survivre pour le venger.

Seulement alors je m’aperçus que mes pieds enfonçaient dans la vase, et que l’eau, qui d’abord couvrait à peine mes épaules, commençait à mouiller mes lèvres.

On dit que celui qui ne connaît pas la peur n’est pas un homme : eh bien, moi, j’ai eu peur ce jour-là, non pas tant des menaces de l’ennemi acharné à notre poursuite que de mourir noyé.

Je fus tiré de mes préoccupations personnelles par un coup de feu suivi d’imprécations et de plusieurs autres coups de feu.

Mon cousin se voyant, découvert, avait déchargé son pistolet sur le groupe qui l’entourait, et qui, malgré la défense du cheik, n’avait pu s’empêcher de riposter.