fois quatre jours, et comme il y avait vingt-quatre chanoines, la chose était de quelque conséquence. L’on en jugera par le statut de l’évêque Henri de Horbourg (1180-1190), qui prend soin de déterminer les mets à servir dans ces occasions. Le dîner devait être composé de neuf genres de mets (fercula, Gænge) ; le porc en faisait le fonds principal ; aussi était-il prescrit au prévôt d’en faire tuer trois pour chaque journée. Les voici dans l’ordre que leur assigne le document épiscopal :
1° Jambons (gambæ postreriores) ; pieds et tête de porc en saumure ou dans une gelée de jeunes porcs ; 2° parties intérieures de la bête accommodées de neuf manières différentes (quod novem recipit confectiones) ; trois sortes de boudins ; Magenwurst, Lungenwurst, Bratwurst ; andouille (Inductile) ; gigot, langue, filet, bajoue, le tout bien poivré ; 3° bœuf fumé reposant sur un lit de choux ; 4° gros lard d’un porc gras et lard d’un jeune porc ; dûment pourvus de poivre ; 5° grillades et rôtis de porc ; 6° verrat garni de viandes de venaison ; 7° lard gras avec forte moutarde ; 8° un plat de millet accommodé aux œufs, au lait et au sang de porc ; 9° enfin, et pour la clôture, épaule de porc rôtie et piquée au lard[1].
Ah ! de grâce, messieurs les chanoines du douzième siècle, laissez-nous respirer ! Si vous ne faisiez rien pendant le reste de l’année, il faut convenir que vous travailliez terriblement, à Noël et à Pâques, pour honorer les antiques traditions, aux dépens de votre pauvre prévôt.
Ce formidable menu ne subissait qu’une légère variante le jour de Pâques : le bœuf fumé était remplacé par une épaule de porc rôti, au vinaigre, et le verrat par des quartiers d’agneaux garnis d’œufs frits au saindoux. Si un jour maigre tombait indiscrètement dans ce temps de frairie, toutes ces richesses porcines restaient dans le garde-manger, et les chanoines ne se trouvaient plus en tête-à-tête qu’avec des saumons à la gelée ou en saumure,
- ↑ Basel im vierzehnten Jahrhundert. Basel, 1856. In-8°, p. 15.