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dix œufs et du lard en suffisance. Depuis la Toussaint jusqu’au carême on substituait six oies aux trois agnelets[1]. Le demi-service reposait sur les mêmes bases, mais proportionnellement réduites.

Parlons tout de suite du carême des chanoines primitifs de Strasbourg. Il n’était pas aussi rigoureux qu’on peut le craindre, du moins les dimanches. Ainsi, au premier dimanche du carême, chaque chanoine recevait une portion de poisson, un quart de fromage, quatre œufs et trois pains, outre le pain ordinaire ; le souper consistait en poissons, en œufs, en galettes et en fromage, auxquels on ajoutait du vin clairet, clara potio, dit le texte, c’est-à-dire du vin mélangé de miel. Depuis le dimanche de Reminiscere jusqu’à celui des Rameaux inclusivement, le dîner était composé d’une portion de poisson, avec une livre d’huile et du vinaigre en suffisance. Pour le souper, on donnait une demi-livre d’huile avec du vinaigre ; pour assaisonner quoi ? On ne le dit pas ; mais c’est du poisson évidemment. Le vendredi dans l’octave de Pâques, la pitance de chaque chanoine consistait en trois portions de saumon suivies d’une galette ; on l’arrosait d’un verre de vin clairet, et d’un autre de charitas, c’est-à-dire de vin d’extra, prélevé sur les rentes de certaines fondations pieuses. Au jour joyeux de Pâques, on enterrait le carême sous un bon dîner, dont voici le détail : potage, trois portions de viande bouillie, quatre de rôti, poulets, agnelets lardés, avec des fritures et des galettes ; trois pains outre le pain ordinaire[2], et la boisson compétente. Pour être bien sûrs que le carême était fini, les chanoines répétaient le même dîner le lundi.

Au douzième siècle, leurs confrères les chanoines de Bâle ne vivaient plus en communauté. Mais en souvenir de l’ancienne commensalité, le prévôt ou chapitre devait les réunir et les traiter deux fois par an, à Noël et à Pâques. Ces agapes duraient chaque

  1. Grandidier, Hist. de l’Église de Strasbourg, t. Ier, p. 180.
  2. Idem, p. 181.