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Le physicien-médecin Rœsslin dit que c’était « une friandise convoitée par toutes les bouches délicates[1] ». Une vieille chronique éditée par Schiller prend soin de nous apprendre que les saumoneaux furent très-chers en 1505, et qu’on les vendit à 1 pfund et 8 schillings strasbourgeois le cent[2].

Les aloses, un autre produit périodique du Rhin, étaient également, et sont encore aujourd’hui, très-recherchées des gourmets. Cet excellent poisson voyageur nous visite au printemps, d’où les Allemands lui ont donné le nom de Maifisch (poisson de mai). — La chronique que je citais tout à l’heure rappelle aussi que les aloses furent hors de prix en 1505 : l’on n’en donnait pendant la semaine sainte que cinq pour une couronne, cherté vraiment calamiteuse pour les amateurs de l’époque, mais qui n’arrêta pas les Wallons qui étaient alors à Strasbourg avec la duchesse de Savoie, fille de l’empereur Maximilien, de les acheter à ce prix excessif pour le service de la table de cette princesse[3].

Une judicieuse déférence, je pourrais dire l’hommage public, avait, de toute ancienneté, assuré la suprématie sur toutes les espèces de poissons nomades au saumon. Il méritait le premier rang et il l’a conservé. Rœsslin l’appelle « le plus noble de tous les poissons de l’Allemagne[4] ». Il abondait au printemps sous le nom de saumon (Salmen), et dans l’automne sous celui de bécard (Lachs).

Autrefois les pêcheurs de Strasbourg avaient fait de cette ville comme une espèce de marché privilégié pour la vente de ce poisson. Ils achetaient tout le saumon qui se prenait depuis Lauffenbourg jusqu’à Philippsbourg[5]. Sa taille et son poids sont variables ; mais nos écrivains rapportent que l’on en voyait souvent qui pesaient

  1. Rœsslin, Das Wasgauische Gebirg, p. 3.
  2. Kœnigshoven-Schilter, Chronick, p. 367.
  3. Idem.
  4. Rœsslin, loc. cit., p. 3.
  5. Friese, Naturgesch. des Elsasses, p. 97.