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depuis cette époque ! Elles avaient du moins le mérite d’être économiques, dans un temps où tous les gens altérés n’auraient pas eu le moyen de porter une améthyste au doigt pour se préserver de l’ivresse.

J’aurais aimé de trouver dans nos vieilles histoires des renseignements sur les caves les plus célèbres de notre pays. L’on parle bien de celles du palais mérovingien de Marlenheim et du canal souterrain que les rois franks avaient construit depuis cette résidence jusqu’à leur château de Kœnigshoven, afin de le pourvoir aisément de vin ; mais ce souvenir est marqué d’une trop forte teinte légendaire. Il nous faut quelque chose de positif, de certain, et cela est rare. Voici pourtant les caves de la ville de Strasbourg situées derrière le Barfüsser-Platz, et les caves de l’hôpital de Strasbourg, qui possèdent des tonneaux qui sont de véritables monuments et des vins qui sont des curiosités historiques. Le savant Roquefort les a visitées et y a vu du vin qui s’appelait vin de Luther, parce qu’il remontait à son temps[1]. Selon Schnéegans, il en existe encore actuellement du seizième siècle[2], et M. Piton dit que l’on en conserve même, dans un petit baril, qui remonte à 1472. M. Piton a donné la description des tonneaux de l’hôpital, dont l’un porte l’inscription suivante :


Mit Gottes Segen sag ich voran.
Noa der Gottes Mann
Nach dem Wein die fass bedacht,
Das er auch erst gemacht.
Gott gebe seinen segen herein
Von Jahr zu Jahr mit gutem Wein. 1715[3].


(Je commence par bénir Dieu. Noé, le saint homme, a pensé aux tonneaux après le vin, et ce fut aussi lui qui fit les premiers. Dieu donne sa bénédiction céans, d’année en année, avec du bon vin. 1715.)


Après les caves de l’hôpital de Strasbourg venaient les caves des

  1. Legrand d’Aussy, Vie privée des Français. Note de Roquefort, t. III, pp. 3, 72.
  2. Schnéegans, Strasb. Geschichten, p. 31.
  3. Piton, Strasbourg illustré. Faubourgs, p. 67.