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Immédiatement après la Réforme, le Magistrat de Strasbourg porta son attention sur ce genre de débordements. Il interdit l’ouverture des auberges et cabarets pendant le prêche et en prescrivit la fermeture à neuf heures du soir. Il défendit de se livrer à la vieille coutume de boire à l’envi, zu trinken, « ni en public, ni secrètement, ni de quelque manière que le cœur de l’homme en pût concevoir le dessein ». Cette prouesse blâmable était punie d’une amende. Celui qui était rencontré ivre devait être emprisonné par les valets de police ; s’il appartenait au Magistrat, la peine était doublée[1]. À Wissembourg, il existait un mandement analogue. Le statut de police d’Ensisheim, de 1590, soumettait les hommes et les femmes qui s’enivraient ou qui provoquaient l’ivresse d’autrui, à l’emprisonnement au pain et à l’eau : les aubergistes étaient punis de la même peine[2] ; à neuf heures, fermeture absolue des cabarets. À Bâle, les ivrognes étaient séquestrés dans le Tollhaus[3]. À Munster, en l’absence d’un statut pénal, la Kirchenordnung de 1575 avait édicté les prohibitions nécessaires et avait fait de la tempérance une obligation confessionnelle[4]. Mulhouse avait ses ordonnances sur le même sujet. Des villages même promulguèrent de petites chartes disciplinaires, comme Berstett. Le règlement municipal de cette commune voulait que le Schultheiss et la justice locale s’informassent si quelque bourgeois faisait trop de dépense ; si les avertissements restaient sans effet, on devait agir pour y remédier. Il limite les dépenses de boisson dans les marchés de vin et prononce 30 schillings d’amende contre celui qui voit ou mange plus qu’il ne peut supporter[5]. Au commencement de ce siècle, l’ivrognerie était encore un vice extrêmement répandu dans l’évêché de Bâle. « Il ne se conclut presque

  1. Voir tous les anciens règlements de police de Strasbourg, depuis 1529 jusqu’à 1789.
  2. Merklen, Histoire d’Ensisheim, t. II, p. 148.
  3. Spreng, Ursprung von Basel, p. 33.
  4. Rœhrich, Mittheilungen, t. Ier, p. 298.
  5. Alsatia, année 1854-1855, p. 235 et 245.