de brise-mollets (Wadenbrecher). Stœber a plaisamment donné pour armoiries au génie de ce vignoble fameux deux mollets en croix[1]. On dit que son nom lui vient du vigneron qui l’a le premier planté ; il s’appelait Kutter, mais la brièveté de sa taille lui imposa le diminutif de Kitterle. Ah ! le traître de petit homme ! Que de grands gaillards il a réduits à ne plus occuper qu’un pied au-dessus de la surface du sol ! Cernay a le vignoble de la Hube, et Uffholtz la côte de Saint-Antoine[2], qui donnait aux Bénédictins de Murbach l’Edler Antoniberger.
Enfin nous arrivons à Thann. La géographie, pour cette fois, est fidèle au grand principe esthétique qui commande que l’intérêt aille toujours en augmentant. Thann est fameux par son Stauffenberg, son Enchenberg, mais surtout par son Rangwein que récoltait le chapitre de Thann, le plus chaud et le plus violent des vins de notre pays. Ses effets redoutables sur le système nerveux lui avaient acquis l’honneur d’inspirer une formule de malédiction : « Que le Rang te heurte ! » comme on disait en Provence que le Maulubec te trousse ! et comme on dit en France que le diable t’emporte ! Ce juron était déjà populaire dans toute l’Allemagne au seizième siècle[3]. Quand les Bourguignons de Charles le Téméraire vinrent à Thann, en 1468, ils y trouvèrent, dit un historien, « du Rangwein des plus exquis, surtout dans la maison du sire de Reinach et dans plusieurs autres ; ce bon vin leur monta vigoureusement les courages[4] ». Fischart l’a bien connu aussi, comme on peut le présumer par cette peinture expressive, dont on ne peut donner la copie en français et que les Allemands seuls comprendront : « Im Rangenwein zu Dann, da steckt der heilig S. Rango, der nimpt den Rang und ringt so lang, bis er einen rængt und brængt unter die Bænk[5]. » Ichtersheim affirme qu’un homme