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un délice, son Trottacker suave, son Zahnacker, pour lequel les gourmets s’inscrivent à l’avance ; Hunawihr et son Mühlfürst ; Riquewihr, le Clos-Vougeot de l’Alsace, qui offre son vin gris (Eschgriesler), son gentil qui embaume tout un appartement, son Schœnberger, si moelleux à la bouche, mais qui excite trop le cerveau, son Sporen, son Sonnenberg, qui était aux comtes de Wurtemberg, son Lüppelsperger, le vin favori de Jean de Manderscheid et dont Fischart disait :


Ô Katzenthaler und Lüppelsperger von Reichenweyer,
Wie halten euch mein Lippen so theuer[1] !


(Ô Katzenthaler et Lüppelsberger de Riquewihr, combien mes lèvres vous tiennent en estime !)


Riquewihr a donné à l’Allemagne un plant qui y est célèbre sous le nom d’Etlinger ou d’Ortlieber. Beblenheim, Kientzheim, où Lazare de Schwendi, revenant des guerres de Hongrie, apporta au seizième siècle, les premiers plants de tokay[2] ; Sigolsheim dont le moine de Saint-Gall vantait les produits, déjà au neuvième siècle, en décrivant l’influence galante du Sigultarius sur le cœur fragile d’un évêque franc de ce temps-là[3]. Kaysersberg, renommé par son Geisburger ; Ammerschwihr, une véritable mamelle bachique qui verse 40,000 mesures de vin dans la consommation, dans une bonne année ; Katzenthal, célébré déjà par Fischart dans les vers que je viens de citer. Colmar n’a que son vin de la Hart, mais qui est délicieux dans les grandes années. Il était déjà si célèbre dans le moyen âge, particulièrement celui des caves des Unterlinden, que l’empereur Albert en exigea une certaine quantité des sœurs de ce monastère, en 1304[4].

Les membres de la société poculative du Wagkeller usaient préférablement du cru d’un vignoble de Kientzheim, qui avait été

  1. Gargantua, ch. iv, édition de 1607.
  2. Musée pittoresque d’Alsace, Kientzheim, p. 59.
  3. Monach. S. Gall, lib. I, ch. xxii.
  4. Annales et Chron. des Dominicains de Colmar, p. 367.