nécessaire pour le service de table des États provinciaux qui s’y tenaient. Le secrétaire de la ville, le docteur Rasser, M. l’abbé Vogel, le directeur de la monnaie, le docteur Scheppelin, trois veuves de jurisconsultes et plusieurs bourgeois envoyèrent à la régence leurs grands et petits plats, leurs assiettes, leurs canettes, leurs salières et jusqu’à leurs chandeliers de cuivre, dont il fut dressé un bon et fidèle état[1]. Les Antonites d’Issenheim étaient plus opulents, sous ce rapport, que les fils de la maison d’Autriche, car, en 1723, des voleurs enlevèrent de leur cuisine, pendant la nuit, deux quintaux d’étain[2]. Nos paysans du pays de Hanau, dans leurs noces gigantesques, sont souvent réduits à user du procédé employé par les archiducs, mais il est de règle de ne pas emprunter de couverts ; chaque invité apporte le sien dans sa poche.
L’argenterie était une grande somptuosité dans les temps anciens. Elle ne se rencontrait que chez les hauts dignitaires de l’Église, chez les princes, chez les gentilshommes éminents et chez les très-riches bourgeois. Elle était l’indice le plus certain de la supériorité sociale. Dès le quinzième siècle, elle ne devait manquer dans aucune grande maison[3]. L’évêque Robert de Bavière en possédait une très-belle qu’il fut forcé de vendre ; il s’y trouvait même des objets en or massif. Quelques bourgeois de Strasbourg en possédaient à la même époque aussi, puisque l’information officielle faite contre la noblesse de 1406 à 1419 nous révèle qu’un noble de Strasbourg fut convaincu de s’être introduit nuitamment dans la maison d’un bourgeois et de lui avoir volé son argenterie[4]. Quand on prit, en 1523, le château d’Ebernburg sur François de Sickingen, on y trouva de la vaisselle d’argent pour 10,000 florins, valeur énorme pour le temps[5].