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de vin sont sacrifiés pour satisfaire ces estomacs robustes ; ce sont des banquets monstres dignes des temps fabuleux. Déjà au commencement de la semaine, les garçons de noce, parés d’un grand bouquet de romarin enrubanné, enjambent les plus beaux chevaux de leur écurie, bien sellés et harnachés et ornés même de rubans, et vont de village en village inviter les convives, où partout les attendent le repas d’usage et le cruchon blanc (Schimmel) rempli de vin. Si le fiancé cherche la jeune mariée dans une autre commune, il arrive avec les voitures, accompagné de ses camarades à cheval ; elles sont chargées de ses meubles, de son linge, de ses provisions, et la voiture principale sur laquelle sont assises la fiancée, les filles d’honneur et ses amies, est toujours décorée de guirlandes et de verdure, et une quenouille gigantesque du plus beau chanvre, parée de rubans et de fleurs, forme le grand mât de cette barque de verdure roulante ; un rouet artistement tourné et incrusté l’accompagne toujours. Arrivée à la maison nuptiale, cette quenouille est fixée comme drapeau devant une fenêtre du premier étage. Déjà avant l’entrée du village, ordinairement sur la limite de la banlieue, les jeunes gens à cheval attendent le convoi ; des hourras, des coups de fusil et de pistolet saluent sa venue, et la cavalcade fait son entrée solennelle aux acclamations générales, jusqu’à ce que la grande cour de la ferme les reçoive et que commence le cortège pédestre vers l’église. Après la cérémonie nuptiale, festins et danses commencent et durent souvent deux ou trois jours et autant de nuits pendant lesquels tout le village est en émoi, surtout si les jeunes mariés appartiennent à de riches familles qui mettent leur gloire et leur orgueil à célébrer les noces avec la plus grande pompe[1]. »

J’ai dit que les règlements somptuaires avaient surtout régné dans les villes libres impériales. J’ajoute qu’ils n’apparaissent formulés et certains que dans les cités protestantes, à Wissembourg,

  1. Strasbourg illustré, t. II, p. 183.