née certainement dans la dureté du monde séculier, avait été adoptée par le couvent de Lucelle[1].
Dans le domaine du gibier, je remarque que nos anciens préparaient déjà les grives avec les exquises rôties de pain que nous aimons encore aujourd’hui[2], qu’ils connaissaient la perdrix aux choux et même les alouettes aux choux[3], qu’ils farcissaient l’oie et le cochon de lait avec des pinsons, des mésanges ou d’autres petites bêtes[4].
Le cerf ou le chevreuil à la sauce douce était un mets de choix. On grillait des pommes dans du saindoux ; on animait ces pommes par une infusion de vin vieux, du sucre, de la cannelle, des girofles ; on y ajoutait des amandes blanches et des raisins de Corinthe ; on laissait cuire doucement[5].
Les mérites mystérieux de la bécasse avaient aussi déjà été devinés. Elle passait, comme de raison, pour un oiseau délicieux. Après trois jours d’exposition au grand air, elle était plumée ; mais on ne la vidait point. Piquée avec de la cannelle et des girofles, saupoudrée de sel et habillée d’une barde de lard, elle était mise à la broche en travers. Quand elle commençait à suer et à gonfler, on disposait sous la bête, dans un lèchefrite, des rôties de pain vigoureusement épicées qui recevaient le jus du gibier. Pendant que cette opération chimique s’accomplissait, on ne devait pas négliger d’arroser la bécasse soit avec du lard fondu, soit avec du bouillon gras[6]. C’est à peu près la méthode actuelle. Mais comment pouvait-on prendre plaisir au mets que voici ? On cuisait des geais et des pies dans un mélange d’eau et de vin qu’on avait soin d’écumer comme le pot-au-feu ; puis on masquait cet indigne gibier d’une sauce brune composée du bouillon