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farine roussie, des raisins de Corinthe, des amandes, du gingembre et de la cannelle[1] ? du conseil que donnait un médecin de cuire des branches de figuier dans le pot-au-feu pour assurer au bouilli la tendreté et l’esculence qui en font le prix[2] ? — À quelle époque remonte chez nous l’emploi du mouton à la daube ? À la fin du dix-septième siècle au moins, puisque je le trouve mentionné, sous cette désignation gallicane même, dans un état de revente de comestibles faite en 1711, par le maître d’hôtel des comtes de Ribeaupierre[3]. La poitrine de veau farcie, si populaire de nos jours, est d’une antiquité plus vénérable ; les Romains nous l’ont enseignée le jour même où ils ont mis pied sur les bords du Rhin[4] ; Apicius la recommandait. Nos aïeux ont-ils mangé de l’ânon rôti ? La question n’est pas aussi déplacée qu’elle le paraît. Les Romains en mangeaient. Le chancelier du Prat était si friand de la chair de ce quadrupède, qu’il le faisait figurer très-souvent aux repas de François Ier[5]. Je suis autorisé à croire que les Alsaciens en mangeaient au treizième et au quatorzième siècle, puisque le chroniqueur du couvent des Dominicains de Colmar signale comme une nouveauté digne de remarque l’introduction de cet aliment dans la cuisine de son siècle[6].

Les quenelles de foie de veau (Leberknöpfle) constituent, depuis un temps immémorial, en Alsace et dans toute l’Allemagne, un mets national et très-usité. On le voit figurer dans les plus anciens bréviaires de la gastronomie germanique. C’est encore aujourd’hui un régal estimé et en honneur sur les tables de la bourgeoisie modeste, mais qui se pique de bien vivre et de demeurer fidèle aux vieilles traditions. Le prince Maximilien de Deux-Ponts en était un amateur déclaré. Il n’oublia pas, sur le

  1. Buchinger, Koch-Buch de 1671, formule 22.
  2. J. Bock, Kreutterbuch de 1577. In-fol., p. 134.
  3. Archives du Haut-Rhin. Fonds de Ribeaupierre. Comptes de 1704.
  4. Mone, Urgeschichte Badens, p. 104.
  5. Blaze, Molière musicien, t. II, p. 439.
  6. Annal. et chron. des Dominicains de Colmar, édition de 1854, p. 93.