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Si chacun des huit bailliages de la seigneurie de Ribeaupierre a fait les choses aussi honnêtement que celui de Sainte-Marie, l’on peut conjecturer que la jeune comtesse a été fort convenablement baptisée.

J’en suis fâché, mais quand je veux signaler un repas correct et digne de quelque attention, c’est l’Église seule qui en fournit le programme. Cela tient à l’indiscrétion naturelle de l’œil des laïques. Ces révolutionnaires se sont toujours mêlés de remarquer et de noter les choses qui ne les regardaient point. Sous ce rapport, Séb. Brant, qui va être mon guide, ne valait pas mieux que le reste. Il nous a laissé la description du festin solennel donné, au palais de Strasbourg, à l’évêque Guillaume de Hohnstein, au mois d’août 1507, pour célébrer sa prise de possession de la dignité épiscopale[1]. L’on apporta d’abord une bouillie froide à l’avoine avec des morceaux de pain grillé ; c’est une purée d’avoine aux croûtons, c’est clair, mais elle était baignée de malvoisie ; 2° de la venaison de cerf en une compote de figues piquée d’amandes blanches ; 3° une pâtisserie pittoresque confectionnée avec des dragées et du beurre fondu, représentant un château ; trois gargouilles fixées dans le donjon épanchaient de l’hippocras dans des vasques d’argent ; 4° une fricassée de chapons et de veau ; 5° une nouvelle pâtisserie décorée représentant cinq jeunes filles dans un jardin fleuri ; 6° des brochets au bleu avec sauce aux herbes ; 7° un civet de gibier ; 8° encore une pièce de pâtisserie représentant un jardin au milieu duquel s’élevait un rocher surmonté d’un cerf dix-cors. À la table privilégiée des membres du Magistrat, Brant compta onze plats et sept pièces de pâtisserie, qu’il ne désigne point. Il fut du reste très-mécontent du festin, qu’il déclare avoir été désagréable et mal préparé, surtout parce que tout était froid. Il critique l’emploi dans la pâtisserie de l’eau collée qui n’empêcha pas les pièces de ballotter misérablement dans les plats au lieu de s’y tenir fermes et fières. Brant ajoute ce

  1. Eintritt des Bischofs. Cod. histor. de Strasbourg, t. II, p. 292.