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j’ai entretenu une correspondance sur les questions d’optique, avec qui j’avais des relations très-courtoises, et qui, dans sa nouvelle édition de l’Abrégé d’Erœleben, ne mentionne pas même mes travaux ? C’est pourtant pour y faire entrer les découvertes les plus nouvelles qu’on réédite un abrégé, et ces messieurs ont l’habitude de les noter assez vite sur leurs livres interfoliés. Combien de manières n’y a-t-il pas d’expédier ainsi un écrit en passant ! Mais cette tête ingénieuse n’a su en ce moment s’aviser d’aucun.

Les dispositions esthétiques et sentimentales sont, en ce moment, fort loin de moi ; que va-t -it advenir de mon pauvre roman ? J’utilise, en attendant, mon temps comme je peux et il y a lieu d’espérer, à la marée basse, que le flux ne tardera pas à revenir.

Le sixième livre de mon roman a aussi produit un heureux effet ; à la vérité, le pauvre lecteur, en face de semblables productions, ne sait jamais où il en est ; car il ne s’avise pas que jamais il ne prendrait ces livres en main, si l’on ne s’entendait à se jouer de sa pénétration, de ses impressions et de sa curiosité.

Ma nouvelle a recueilli beaucoup d’approbations précieuses, et à l’avenir, je travaillerai en ce genre avec plus de confiance.

Le dernier volume de mon roman ne peut pas, dans tous les cas, paraître avant la Saint-Michel[1] ; il serait très-bon de mettre à ce sujet à exécution les plans dont vous me parliez dernièrement.

Mon nouveau conte aura de la peine à être terminé en décembre ; je ne puis même passer à celui-là sans avoir dit, d’une manière ou d’une autre, quelques mots d’explication sur le premier. Si je puis achever quelque chose de passable en ce genre au mois de décembre, je serai heureux de prendre part de cette manière aux premiers débuts de l’année.

Portez-vous bien ! Puissions-nous longtemps encore jouir des nôtres et de notre amitié. Pour la nouvelle année, j’espère vous rendre encore une visite de quelques jours.

Weimar, le 21 novembre 1795.
Gœthe.
  1. La fête et la foire de Saint-Michel.