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Je passe, ébouriffé, ma folie en sautoir,
dans les Grands-Magasins et les petits boudoirs.
Je surprends. Je séduis. Je captive. J’éclate !
Je fais beaucoup de bruit pour rien, avec ma batte,
et je me permets tout, sauf ennuyer les gens.
Je demande — et cela n’est pas être exigeant ! —
à la laideur de l’or, aux femmes des caprices,
à l’amour des plaisirs, aux amis des services,
des chapeaux à Rebaux, des rimes à Rosland…
pourvu que tout cela ne dure qu’un instant.
Je prends ce qui reluit, laissant aux fous les songes
et je donne en échange aux badauds des mensonges.
Je cabriole et fuis… Que l’on me veuille ou non,
j’accours sans crier gare et sans dire mon nom.
Je gambade en cassant tous les fils dans les âmes,
Jette du sable aux yeux, donne un amant aux femmes,
fais fleurir des gilets aux notes des tailleurs.
Et quand vient l’heure des regrets, m’en vais ailleurs.
Je hais les lendemains et les déshabillages !
Je vais vite, comme un grand seigneur en voyage.
Je n’ai besoin, passeur ou passant passager,
que d’une heure, et mon heure est l’heure du berger.