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dans la lumière et la poussière de charbon,
et quand ils ont atteint, au bout de leurs poursuites,
de l’eau, des docks, et des hôtels cosmopolites,
on les débarque, un matin chaud, sur un ponton.

Éblouis et déçus, ils s’efforcent de vivre…
mais ils sentent les ciels de métal écraser
leur âme de vieillards et de civilisés,
et leurs sens fabriqués ailleurs, avec des livres.
Et dans cette nature impérieuse et bête
comme une courtisane, où d’éternels étés
exaspèrent leurs nerfs épuisés, ils regrettent
les vieux ciels que leurs yeux n’auraient pas dû quitter.
Ils regrettent, pendant les nuits coloniales,
le vol des angelus sur les champs attristés,
les clairs de lune et les profils de cathédrales,
la Campagne endormie, et les vieilles cités
où se meurt lentement l’Europe catholique…
Et l’amour les reprend, éperdu, nostalgique,
d’un bon Dieu délaissé, du bon Dieu de là-bas,
qui ne supporte pas les longues traversées,
et qui reste avec ses dévotes bien coiffées,