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CHAP. VI. LE DROIT DE PROPRIÉTÂ. 65

OÙ les cérémonies du culte s'accomplissent, ni même qu'il ait vue sur lui : aussi appelle-t-on ces dieux les dieux cachés, PX'O') ou les dieux intérieurs, Pénates. Pour que celte règle religieuse soit bien remplie, il faut qu'autour du foyer, à une certaine distance, il y ait une enceinte. Peu importe qu'elle soit formée par une haie, par une cloison de bois, ou par un mur de pierre. Quelle qu'elle soit, elle marque la limite qui sépare le domaine d'un foyer du domaine d'un autre foyer. Cette enceinte est réputée sacrée *. Il y a impiété à la franchir. Le dieu veille sur elle et la tient sous sa garde : aussi donne- t-on à ce dieu l'épithète de Ipxsîbç». Cette enceinte tracée par la religion et protégée par elle est l'emblème le plus certain, la marque la plus irrécusable du droit de propriété.

Reportons-nous aux âges primitifs, de la race aryenne. L'en- cemte sacrée que les Grecs appellent ?pxoç et les Latins /ierdwm, c'est l'enclos assez étendu dans lequel la famille a sa maison, ses troupeaux, le petit champ qu'elle cultive. Au milieu s'élève le foyer protecteur. Descendons aux âges suivants : la popu- lation est arrivée jusqu'en Grèce et en Italie, et elle a bâti des villes. Les demeures se sont rapprochées ; elles ne sont pourtant pas contiguës. L'enceinte sacrée existe encore, mais dans de moindres proportions-, elle est le plus souvent réduite à un petit mur, à un fossé, à un sillon, ou à une simple bande de terre de quelques pieds de largeur. Dans tous les cas, deux maisons ne doivent pas se toucher; la mitoyenneté est une chose réputée impossible. Le même mur ne peut pas être commun à deux maisons ; car alors l'enceinte sacrée des dieux domestiques aurait disparu. Â Rome, la loi ûxe à deux pieds et demi la largeur de l'espace libre qui doit toujours séparer deux

��1. "Ef xof tifàv. Sophocle, Trachin., 60S.

2. A l'époque où cet anciea culte fut presque effacé par la religion plus brillaoU de Zeus, et où l'on asàocia Zeus à la diTinité du foyer, le dieu nouveau prit pour lui l'épithète de ioxtïoç. Il n'en est pas moins vrai qu'à l'origine le véritable protecteur de l'enceinte était le dieu domestique. Denys d'Halicarnasse l'atteste (I, 67) quand il dit que les 6«o\ Ipxtïoi sont les mêmes que les Pénates. Cela ressort, d'ailleurs, du rapprochement d'un passage de Pausanias {IV, 17) avec un passage d'Euripide (Trot/., 17) et un de Virgile (£n., II, 5i4); ces trois passages se rapportent au même fait et montrent que le Zi^ lf»î»« n'oet autre que le foyer domestique.

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