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droit, gouvernement s’étaient confondus et n’avaient été qu’une même chose sous trois aspects divers.

Nous avons cherché à mettre en lumière ce régime social des anciens, où la religion était maîtresse absolue dans la vie privée et dans la vie publique ; où l’État était une communauté religieuse, le roi un pontife, le magistrat un prêtre, la loi une formule sainte ; où le patriotisme était de la piété, l’exil une excommunication ; où la liberté individuelle était inconnue, où l’homme était asservi à l’État de l’âme, par son corps, par ses biens ; où la haine était obligatoire contre l’étranger, où la notion du droit et du devoir, de la justice et de l’affection s’arrêtait aux limites de la cité ; où l’association humaine était nécessairement bornée dans une certaine circonférence autour d’un prytanée, et où l’on ne voyait pas la possibilité de fonder des sociétés plus grandes. Tels furent les traits caractéristiques de la société grecque et italienne pendant une période dont on peut évaluer l’étendue à quinze siècles.

Mais peu à peu, nous l’avons vu, la société se modifia. Des changements s’accomplirent dans le gouvernement et dans le droit, en même temps que dans les croyances. Déjà dans les cinq siècles qui précèdent le christianisme, l’alliance n’était plus aussi intime entre la religion d’une part, le droit et la politique de l’autre. Les efforts des classes opprimées, le renversement de la caste sacerdotale, le travail des philosophes, le progrès de la pensée avaient ébranlé les vieux principes de l’association humaine. On avait fait d’incessants efforts pour s’affranchir de l’empire de cette religion, à laquelle l’homme ne pouvait plus croire ; le droit et la politique s’étaient peu à peu dégagés de ses liens.

Seulement, cette espèce de divorce venait de l’effacement de l’ancienne religion ; si le droit et la politique