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Arrétium, refusa d’entrer dans cette coalition ; c’est que l’aristocratie prévalait encore dans Arrétium.[1] Quand Annibal était en Italie, toutes les villes étaient agitées ; mais il ne s’agissait pas de l’indépendance ; dans chaque ville l’aristocratie était pour Rome, et la plèbe pour les Carthaginois.[2]

La manière dont Rome était gouvernée peut rendre compte de cette préférence constante que l’aristocratie avait pour elle. La série des révolutions s’y déroulait comme dans toutes les villes, mais plus lentement. En 509, quand les cités latines avaient déjà des tyrans, une réaction patricienne avait réussi dans Rome. La démocratie s’éleva ensuite, mais à la longue, avec beaucoup de mesure et de tempérament. Le gouvernement romain fut donc plus longtemps aristocratique qu’aucun autre, et put être longtemps l’espoir du parti aristocratique.

Il est vrai que la démocratie finit par l’emporter dans Rome, mais, alors même, les procédés et ce qu’on pourrait appeler les artifices du gouvernement restèrent aristocratiques. Dans les comices par centuries les voix étaient réparties d’après la richesse. Il n’en était pas tout à fait autrement des comices par tribus ; en droit, nulle distinction de richesse n’y était admise ; en fait, la classe pauvre, étant enfermée dans les quatre tribus urbaines, n’avait que quatre suffrages à opposer aux trente et un de la classe des propriétaires. D’ailleurs, rien n’était plus calme, à l’ordinaire, que ces réunions, nul n’y parlait que le président ou celui à qui il donnait la parole ; on n’y écoutait guère d’orateurs ; on y discutait peu ; tout se réduisait, le plus souvent, à voter par oui ou par non, et à compter les votes ; cette dernière opération étant fort compliquée demandait beaucoup de temps et beaucoup de calme. Il faut ajouter à cela que le Sénat n’était pas renouvelé tous

  1. Tite Live, X, 1.
  2. Tite Live, XXIII, 13, 14, 39 ; XXIV, 2, 3.