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n’était possible, et l’aristocratie, grâce à son éducation militaire et à l’étroite union de ses membres, était toujours assez forte pour tenir tête à chacune des classes ennemies.

Les rois essayèrent ce qu’aucune classe ne pouvait réaliser. Tous ceux d’entre eux qui aspirèrent à sortir de l’état d’infériorité où l’aristocratie les tenait, cherchèrent un appui chez les hommes de condition inférieure. Pendant la guerre médique, Pausanias forma le projet de relever à la fois la royauté et les basses classes, en renversant l’oligarchie. Les Spartiates le firent périr, l’accusant d’avoir noué des relations avec le roi de Perse ; son vrai crime était plutôt d’avoir eu la pensée d’affranchir les Hilotes.[1] On peut compter dans l’histoire combien sont nombreux les rois qui furent exilés par les éphores ; la cause de ces condamnations se devine bien, et Aristote la dit : Les rois de Sparte, pour tenir tête aux éphores et au Sénat, se faisaient démagogues.[2]

En 397, une conspiration faillit renverser ce gouvernement oligarchique. Un certain Cinadon, qui n’appartenait pas à la classe des Égaux, était le chef des conjurés. Quand il voulait affilier un homme au complot, il le menait sur la place publique, et lui faisait compter les citoyens ; en y comprenant les rois, les éphores, les sénateurs, on arrivait au chiffre d’environ soixante-dix. Cinadon lui disait alors : Ces gens-là sont nos ennemis ; tous les autres, au contraire, qui remplissent la place au nombre de plus de quatre mille, sont nos alliés. Il ajoutait : Quand tu rencontres dans la campagne un Spartiate, vois en lui un ennemi et un maître ; tous les autres hommes sont des amis.

Hilotes, Laconiens, Néodamodes, ύπομείονες, tous s’étaient associés, cette fois, et étaient les complices de Cinadon ; car tous, dit

  1. Aristote, Politique, VIII, 1 (V, 1). Thucydide, I, 132
  2. Aristote, Politique, II, 6, 14.