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l’avait été l’ancienne ; les pauvres voulurent être citoyens et firent effort pour entrer à leur tour dans le corps politique.

Il est impossible d’entrer dans le détail de cette nouvelle lutte. L’histoire des cités, à mesure qu’elle s’éloigne de l’origine, se diversifie de plus en plus. Elles poursuivent la même série de révolutions ; mais ces révolutions s’y présentent sous des formes très variées. On peut du moins faire cette remarque que dans les villes où le principal élément de la richesse était la possession du sol, la classe riche fut plus longtemps respectée et plus longtemps maîtresse ; et qu’au contraire dans les cités, comme Athènes, où il y avait peu de fortunes territoriales et où l’on s’enrichissait surtout par l’industrie et le commerce, l’instabilité des fortunes éveilla plus tôt les convoitises ou les espérances des classes inférieures, et l’aristocratie fut plus tôt attaquée.

Les riches de Rome résistèrent beaucoup mieux que ceux de la Grèce ; cela tient à des causes que nous dirons plus loin. Mais quand on lit l’histoire grecque, on remarque avec quelque surprise combien l’aristocratie nouvelle se défendit faiblement. Il est vrai qu’elle ne pouvait pas, comme les eupatrides, opposer à ses adversaires le grand et puissant argument de la tradition et de la piété. Elle ne pouvait pas appeler à son secours les ancêtres et les dieux. Elle n’avait pas de point d’appui dans ses propres croyances ; elle n’avait pas foi dans la légitimité de ses privilèges.

Elle avait bien la force des armes ; mais cette supériorité même finit par lui manquer. Les constitutions que les États se donnent, dureraient sans doute plus longtemps si chaque État pouvait demeurer dans l’isolement, ou si du moins il pouvait vivre toujours en paix. Mais la guerre dérange les rouages des constitutions et hâte les changements. Or entre ces cités de la Grèce et de l’Italie l’état de guerre était