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que : familiam ducere, disait-on de celui qui se détachait de la gens et allait faire souche à part, comme on disait ducere coloniam de celui qui quittait la métropole et allait au loin fonder une colonie. Le frère qui s’était ainsi séparé du frère aîné, avait désormais son foyer propre, qu’il avait sans doute allumé au foyer commun de la gens, comme la colonie allumait le sien au prytanée de la métropole. La gens ne conserva plus qu’une sorte d’autorité religieuse à l’égard des différentes familles qui s’étaient détachées d’elle. Son culte eut la suprématie sur leurs cultes. Il ne leur fut pas permis d’oublier qu’elles étaient issues de cette gens ; elles continuèrent à porter son nom ; à des jours fixés, elles se réunirent autour du foyer commun, pour vénérer l’antique ancêtre ou la divinité protectrice. Elles continuèrent même à avoir un chef religieux et il est probable que l’aîné conserva son privilège pour le sacerdoce, qui resta longtemps héréditaire. À cela près, elles furent indépendantes.

Ce démembrement de la gens eut de graves conséquences. L’antique famille sacerdotale, qui avait formé un groupe si bien uni, si fortement constitué, si puissant, fut pour toujours affaiblie. Cette révolution prépara et rendit plus faciles d’autres changements.


CHAPITRE VI.

Les clients s’affranchissent.

1° Ce que c’était d’abord que la clientèle et comment elle s’est transformée.

Voici encore une révolution dont on ne peut pas indiquer la date, mais qui a très-certainement modifié la constitution de la famille et de la société elle-même. La famille antique comprenait, sous l’auto-