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nous trouvons une classe d’hommes que le poëte appelle les chefs ou les rois ; ce sont eux qui rendent la justice au peuple. Pindare nous montre aussi une classe de chefs chez les Cadméens ; à Thèbes, il vante la race sacrée des Spartes, à laquelle Épaminondas rattacha plus tard sa naissance. On ne peut guère lire Pindare sans être frappé de l’esprit aristocratique qui règne encore dans la société grecque au temps des guerres médiques ; et l’on devine par là combien cette aristocratie fut puissante un siècle ou deux plus tôt. Car ce que le poëte vante le plus dans ses héros, c’est leur famille, et nous devons supposer que cette sorte d’éloge avait alors un grand prix et que la naissance semblait encore le bien suprême. Pindare nous montre les grandes familles qui brillaient alors dans chaque cité ; dans la seule cité d’Égine il nomme les idylides, les Théandrides, les Euxénides, les Blepsiades, les Chariades, les Balychides. À Syracuse il vante la famille sacerdotale des Jamides, à Agrigente celle des Emménides, et ainsi dans toutes les villes dont il a occasion de parler.

À Épidaure, le corps tout entier des citoyens, c’est-à-dire de ceux qui avaient des droits politiques, ne se composa longtemps que de 180 membres ; tout le reste « était en dehors de la cité[1]. ». Les vrais citoyens étaient moins nombreux encore à Héraclée, où les cadets des grandes familles n’avaient pas de droits politiques[2]. Il en fut longtemps de même à Cnide, à Istros, à Marseille. À Théra, tout le pouvoir était aux mains de quelques familles qui étaient réputées sacrées. Il en était ainsi à Apollonie[3]. À Érythres il existait une classe aristocratique que l’on nommait les Basilides. Dans les villes d’Eu-

  1. Plutarque, Quest. gr., 1.
  2. Aristote, Politique, VIII, 5, 2.
  3. Aristote, Politique, III, 9, 8 ; VI, 3, 8.