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le vol des oiseaux. L’assemblée du peuple se sépare dès que quelqu’un assure qu’il a paru dans le ciel un signe funeste. Si un sacrifice a été troublé par l’annonce d’une mauvaise nouvelle, il faut le recommencer[1].

L’Athénien ne commence guère une phrase sans invoquer d’abord la bonne Fortune. Il met ce mot invariablement à la tête de tous ses décrets. À la tribune, l’orateur débute volontiers par une invocation aux dieux et aux héros qui habitent le pays. On mène le peuple en lui débitant des oracles. Les orateurs, pour faire prévaloir leur avis, répètent à tout moment : La déesse ainsi l’ordonne[2].

Nicias appartient à une grande et riche famille. Tout jeune, il conduit au sanctuaire de Délos une théorie, c’est-à-dire des victimes et un chœur pour chanter les louanges du dieu pendant le sacrifice. Revenu à Athènes, il fait hommage aux dieux d’une partie de sa fortune, dédiant une statue à Athéné, une chapelle à Dionysos. Tour à tour il est hestiateur et fait les frais du repas sacré de sa tribu ; il est chorège et entretient un chœur pour les fêtes religieuses. Il ne passe pas un jour sans offrir un sacrifice à quelque dieu. Il a un devin attaché à sa maison, qui ne le quitte pas et qu’il consulte sur les affaires publiques aussi bien que sur ses intérêts particuliers. Nommé général, il dirige une expédition contre Corinthe ; tandis qu’il revient vainqueur à Athènes, il s’aperçoit que deux de ses soldats morts sont restés sans sépulture sur le territoire ennemi ; il est saisi d’un scrupule religieux ; il arrête sa flotte, et envoie un héraut demander aux Corinthiens la permission d’ensevelir les deux cadavres. Quelque temps après, le peuple athénien délibère sur l’expédition de Sicile.

  1. Aristophane, Paix, 1084, Oiseaux, 596, 718. Schol. ad Aves, 721. Thucydide, II, 8.
  2. Lycurgue, I, 1. Aristophane, Chevaliers, 903,999,1171,1179.