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occupent notre pays.[1] » On cherchait bien à invoquer, s’il était possible, des divinités qui fussent communes aux deux villes. On jurait par ces dieux qui sont visibles à tous, le soleil qui éclaire tout, la terre nourricière. Mais les dieux de chaque cité et ses héros protecteurs touchaient bien plus les hommes et il fallait que les contractants les prissent à témoin, si l’on voulait qu’ils fussent véritablement liés par la religion.

De même que pendant la guerre les dieux s’étaient mêlés aux combattants, ils devaient aussi être compris dans le traité. On stipulait donc qu’il y aurait alliance entre les dieux comme entre les hommes des deux villes. Pour marquer cette alliance des dieux, il arrivait quelquefois que les deux peuples s’autorisaient mutuellement à assister à leurs fêtes sacrées[2]. Quelquefois ils s’ouvraient réciproquement leurs temples et faisaient un échange de rites religieux. Rome stipula un jour que le dieu de la ville de Lanuvium protégerait dorénavant les Romains, qui auraient le droit de le prier et d’entrer dans son temple[3]. Souvent chacune des deux parties contractantes s’engageait à offrir un culte aux divinités de l’autre. Aussi les Éléens, ayant conclu un traité avec les Étoliens, offrirent dans la suite un sacrifice annuel aux héros de leurs alliés[4].

Il était fréquent qu’à la suite d’une alliance on représentât par des statues ou des médailles les divinités des deux villes se donnant la main. C’est ainsi qu’on a des médailles où nous voyons unis l’Apollon de Milet et le Génie de Smyrne, la Pallas des Sidéens et l’Artémis de Perge, l’Apollon d’Hiérapolis et l’Artémis d’Éphèse. Virgile, parlant d’une alliance entre la Thrace et les Troyens, montre les Pénates des deux peuples unis et associés.

  1. Thucydide, II.
  2. Thucydide, V, 23. Plutarque, Thésée, 25. 33.
  3. Tite-Live, VIII, 14.
  4. . Pausanias, V, 15.