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On voit dans le droit romain et l’on trouve aussi dans les lois d’Athènes que le père pouvait vendre son fils[1]. C’est que le père pouvait disposer de toute la propriété qui était dans la famille, et que le fils lui-même pouvait être envisagé comme une propriété, puisque ses bras et son travail étaient une source de revenu. Le père pouvait donc à son choix garder pour lui cet instrument de travail ou le céder à un autre. Le céder, c’était ce qu’on appelait vendre le fils. Les textes que nous avons du droit romain ne nous renseignent pas clairement sur la nature de ce contrat de vente et sur les réserves qui pouvaient y être contenues. Il paraît certain que le fils ainsi vendu ne devenait pas l’esclave de l’acheteur. Ce n’était pas sa liberté qu’on vendait, mais seulement son travail. Même dans cet état, le fils restait encore soumis à la puissance paternelle, ce qui prouve qu’il n’était pas considéré comme sorti de la famille. On peut croire que cette vente n’avait d’autre effet que d’aliéner pour un temps la possession du fils par une sorte de contrat de louage. Plus tard elle ne fut usitée que comme un moyen détourné d’arriver à l’émancipation du fils.

III. Plutarque nous apprend qu’à Rome les femmes ne pouvaient pas paraître en justice, même comme témoins[2] On lit dans le jurisconsulte Gaius : « Il faut savoir qu’on ne peut rien céder en justice aux personnes qui sont en puissance, c’est-à-dire à la femme, au fils, à l’esclave. Car de ce que ces personnes ne pouvaient rien avoir en propre on a conclu avec raison qu’elles ne pouvaient non plus rien revendiquer en justice. Si votre fils, soumis à votre puissance, a commis un délit, l’action en justice est donnée contre vous. Le délit commis par un fils contre son père ne donne lieu à aucune action[3]

  1. Plutarque, Solon, 13. Denys d’Halic., II, 26. Gaius, I, 117 ; I, 132 ; IV. 79. Ulpien, X, 1. Tite-Live, XLI, 8. Festus, v. deminutus.
  2. Plutarque, Publicola, 8.
  3. Gaius, II, 96 ; IV, 77. 78