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Droit de reconnaître l’enfant à sa naissance ou de le repousser. Ce droit est attribué au père par les lois grecques[1] aussi bien que par les lois romaines. Tout barbare qu’il est, il n’est pas en contradiction avec les principes sur lesquels la famille est fondée. La filiation, même incontestée, ne suffit pas pour entrer dans le cercle sacré de la famille ; il faut le consentement du chef et l’initiation au culte. Tant, que l’enfant n’est pas associé à la religion domestique, il n’est rien pour le père.

Droit de répudier la femme, soit en cas de stérilité, parce qu’il ne faut pas que la famille s’éteigne, soit en cas d’adultère, parce que la famille et la descendance doivent être pures de toute altération.

Droit de marier sa fille, c’est-à-dire de céder à un autre la puissance qu’il a sur elle. Droit de marier son fils ; le mariage du fils intéresse la perpétuité de la famille.

Droit d’émanciper, c’est-à-dire d’exclure un fils de la famille et du culte.

Droit d’adopter, c’est-à-dire d’introduire un étranger près du foyer domestique.

Droit de désigner en mourant un tuteur à sa femme et à ses enfants.

Il faut remarquer que tous ces droits étaient attribués au père seul, à l’exclusion de tous les autres membres de la famille. La femme n’avait pas le droit de divorcer, du moins dans les époques anciennes. Même quand elle était veuve, elle ne pouvait ni émanciper ni adopter. Elle n’était jamais tutrice, même de ses enfants. En cas de divorce, les enfants restaient avec le père, même les filles. Elle n’avait jamais ses enfants en sa puissance. Pour le mariage de sa fille, son consentement n’était pas demandé[2].

  1. Hérodote, I, 59. Plutarque, Alcib., 23 ; Agésilas, 3.
  2. Démosthène, in Eubul., 40 et 43. Gaius, I, 155. Ulpien, VIII, 8. Institutes, I, 9. Digeste, liv. I, tit. 1, 11.