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LIVRE II. LA FAMILLE.

le mot ὑμέναιε, et qui était probablement le reste sacré et inviolable d’une antique formule.

Le cortége s’arrête devant la maison du mari. Là, on présente à la jeune fille le feu et l’eau. Le feu, c’est l’emblême de la divinité domestique ; l’eau, c’est l’eau lustrale, qui sert à la famille pour tous les actes religieux. Pour que la jeune fille entre dans la maison, il faut, comme en Grèce, simuler l’enlèvement. L’époux doit la soulever dans ses bras, et la porter par dessus le seuil sans que ses pieds le touchent.

3o  L’épouse est conduite alors devant le foyer, là où sont les Pénates, où tous les dieux domestiques et les images des ancêtres sont groupés autour du feu sacré. Les deux époux, comme en Grèce, font un sacrifice, versent la libation, prononcent quelques prières, et mangent ensemble un gâteau de fleur de farine (panis farreus).

Ce gâteau mangé au milieu de la récitation des prières, en présence et sous les yeux des divinités domestiques, est ce qui fait l’union sainte de l’époux et de l’épouse[1]. Dès lors ils sont associés dans le même culte. La femme a les mêmes dieux, les mêmes rites, les mêmes prières, les mêmes fêtes que son mari. De là cette vieille définition du mariage que les jurisconsultes nous ont conservée : Nuptiæ sunt divini juris et humani communicatio. Et cette autre : uxor socia humanæ rei atque divinæ[2]. C’est

  1. Nous parlerons plus tard des autres formes de mariage qui furent usitées chez les Romains et où la religion n’intervenait pas. Qu’il nous suffise de dire ici que le mariage sacré nous paraît être le plus ancien ; car il correspond aux plus anciennes croyances et il n’a disparu qu’à mesure qu’elles s’affaiblissaient.
  2. Digeste, XXIII, 2., 1 Code, IX, 32, 4. Denys d’Halic., II, 25 : κοινωνὸς χρημάτων καὶ ἱερῶν. Étienne de Byz., πάτρα.