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LIVRE V. LE RÉGIME MUNICIPAL DISPARAÎT.

sité de sortir du système municipal et d’arriver à une autre forme de gouvernement que la cité. Beaucoup d’hommes songeaient au moins à établir au-dessus des cités une sorte de pouvoir souverain qui veillât au maintien de l’ordre et qui forçât ces petites sociétés turbulentes à vivre en paix. C’est ainsi que Phocion, un bon citoyen, conseillait à ses compatriotes d’accepter l’autorité de Philippe, et leur promettait à ce prix la concorde et la sécurité.

En Italie, les choses ne se passaient pas autrement qu’en Grèce. Les villes du Latium, de la Sabine, de l’Étrurie étaient troublées par les mêmes révolutions et les mêmes luttes, et l’amour de la cité disparaissait. Comme en Grèce, chacun s’attachait volontiers à une ville étrangère, pour faire prévaloir ses opinions ou ses intérêts dans la sienne.

Ces dispositions des esprits firent la fortune de Rome. Elle appuya partout l’aristocratie, et partout aussi l’aristocratie fut son alliée. Citons quelques exemples. La gens Claudia quitta la Sabine parce que les institutions romaines lui plaisaient mieux que celles de son pays. À la même époque, beaucoup de familles latines émigrèrent à Rome, parce qu’elles n’aimaient pas le régime démocratique du Latium et que Rome venait de rétablir le règne du patriciat[1]. À Ardée, l’aristocratie et la plèbe étant en lutte, la plèbe appela les Volsques à son aide, et l’aristocratie livra la ville aux Romains[2]. L’Étrurie était pleine de dissensions ; Veji avait renversé son gouvernement aristocratique ; les Romains l’attaquèrent, et les autres villes étrusques, où dominait encore l’aristocratie

  1. Denys, VI, 2.
  2. Tite-Live, IV, 9, 10.