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CH. X. ÉTABLISSEMENT DE LA DÉMOCRATIE.

d’une des deux classes moyennes pour avoir accès au Sénat et aux tribunaux[1].

Il en fut de même à Rome. Nous avons déjà vu que Servius ne détruisit la puissance du patriciat qu’en fondant une aristocratie rivale. Il créa douze centuries de chevaliers choisis parmi les plus riches plébéiens ; ce fut l’origine de l’ordre équestre, qui fut dorénavant l’ordre riche de Rome. Les plébéiens qui n’avaient pas le cens fixé pour être chevalier, furent répartis en cinq classes suivant le chiffre de leur fortune. Les prolétaires furent en dehors de toute classe. Ils n’avaient pas de droits politiques ; s’ils figuraient dans les comices par centuries, il est sûr du moins qu’ils n’y votaient pas[2]. La constitution républicaine conserva ces distinctions établies par un roi, et la plèbe ne se montra pas d’abord très-désireuse de mettre l’égalité entre ses membres.

Ce qui se voit si clairement à Athènes et à Rome, se retrouve dans presque toutes les autres cités. À Cumes, par exemple, les droits politiques ne furent donnés d’abord qu’à ceux qui, possédant des chevaux, formaient une sorte d’ordre équestre ; plus tard, ceux qui venaient après eux pour le chiffre de la fortune, obtinrent les mêmes droits, et cette dernière mesure n’éleva qu’à mille le nombre des citoyens. À Rhégium, le gouvernement fut longtemps aux mains des mille plus riches de la cité. À Thurii, il fallait un cens très-élevé pour faire partie du corps politique. Nous voyons clairement dans les poésies de Théognis qu’à Mégare, après la chute des nobles, ce fut la richesse qui régna. À Thèbes, pour

  1. Plutarque, Solon, 18 ; Aristide, 13. Aristote cité par Harpocration, aux mots ἵππεις, θῆτες. Pollux, VIII, 129.
  2. Tite-Live, I, 43.