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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

fonder la démocratie, dit-il, on fera ce que fit Clisthènes chez les Athéniens : on établira de nouvelles tribus et de nouvelles phratries ; aux sacrifices héréditaires des familles on substituera des sacrifices où tous les hommes seront admis ; on confondra autant que possible les relations des hommes entre eux, en ayant soin de briser toutes les associations antérieures[1]

Lorsque cette réforme est accomplie dans toutes les cités, on peut dire que l’ancien moule de la société est brisé et qu’il se forme un nouveau corps social. Ce changement dans les cadres que l’ancienne religion héréditaire avait établis et qu’elle déclarait immuables, marque la fin du régime religieux de la cité.

3o  Histoire de cette révolution à Rome.

La plèbe eut de bonne heure à Rome une grande importance. La situation de la ville entre les Latins, les Sabins et les Étrusques la condamnait à une guerre perpétuelle, et la guerre exigeait qu’elle eût une population nombreuse. Aussi les rois avaient-ils accueilli et appelé tous les étrangers, sans avoir égard à leur origine. Les guerres se succédaient sans cesse, et comme on avait besoin d’hommes, le résultat le plus ordinaire de chaque victoire était qu’on enlevait à la ville vaincue sa population pour la transférer à Rome. Que devenaient ces hommes ainsi amenés avec le butin ? S’il se trouvait parmi eux des familles sacerdotales et patriciennes, le patriciat s’empressait de se les adjoindre. Quant à la foule, une partie entrait dans la clientèle des grands ou du roi, une partie était reléguée dans la plèbe.

  1. Aristote, Pol., VII, 3, 11 (VI, 3).