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CH. VII. LA PLÈBE ENTRE DANS LA CITÉ.

2o  Histoire de cette révolution à Athènes.

Les eupatrides, après le renversement de la royauté, gouvernèrent Athènes pendant quatre siècles. Sur cette longue domination l’histoire est muette ; on n’en sait qu’une chose, c’est qu’elle fut odieuse aux classes inférieures et que le peuple fit effort pour sortir de ce régime.

L’an 598, le mécontentement que l’on voyait général, et les signes certains qui annonçaient une révolution prochaine, éveillèrent l’ambition d’un eupatride, Cylon, qui songea à renverser le gouvernement de sa caste et à se faire tyran populaire. L’énergie des archontes fit avorter l’entreprise ; mais l’agitation continua après lui. En vain les eupatrides mirent en usage toutes les ressources de leur religion. En vain ils dirent que les dieux étaient irrités et que des spectres apparaissaient. En vain ils purifièrent la ville de tous les crimes du peuple et élevèrent deux autels à la Violence et à l’Insolence, pour apaiser ces deux divinités dont l’influence maligne avait troublé les esprits[1]. Tout cela ne servit de rien. Les sentiments de haine ne furent pas adoucis. On fit venir de Crète le pieux Épiménide, personnage mystérieux qu’on disait fils d’une déesse ; on lui fit accomplir une série de cérémonies expiatoires ; on espérait, en frappant ainsi l’imagination du peuple, raviver la religion et fortifier par conséquent l’aristocratie. Mais le peuple ne s’émut pas ; la religion des eupatrides n’avait plus de prestige sur son âme ; il persista à réclamer des réformes.

  1. Diogène Laërce, I, 110. Cic., De leg., II, 11. Athénée, p. 602.