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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

l’autorité de l’eupatride sur le sol, son autorité sur l’homme, et il pouvait dire dans ses vers : « Ceux qui sur cette terre subissaient la cruelle servitude et tremblaient devant un maître, je les ai faits libres. »

Il est probable que ce fut cet affranchissement que les contemporains de Solon appelèrent du nom de σεισαχθεία (secouer le fardeau). Les générations suivantes qui, une fois habituées à la liberté, ne voulaient ou ne pouvaient pas croire que leurs pères eussent été serfs, expliquèrent ce mot comme s’il marquait seulement une abolition des dettes. Mais il a une énergie qui nous révèle une plus grande révolution. Ajoutons-y cette phrase d’Aristote qui, sans entrer dans le récit de l’œuvre de Solon, dit simplement : Il fit cesser l’esclavage du peuple[1].

3o Transformation de la clientèle à Rome.

Cette guerre entre les clients et les patrons a rempli aussi une longue période de l’existence de Rome. Tite-Live, à la vérité, n’en dit rien, parce qu’il n’a pas l’habitude d’observer de près le changement des institutions ; d’ailleurs les annales des pontifes et les documents analogues où avaient puisé les anciens historiens que Tite-Live compulsait, ne devaient pas donner le récit de ces luttes domestiques.

Une chose du moins est certaine. Il y a eu, à l’origine de Rome, des clients ; il nous est même resté des témoignages très-précis de la dépendance où leurs patrons les tenaient. Si, plusieurs siècles après, nous cherchons ces clients, nous ne les trouvons plus. Le nom existe encore, non la clientèle. Car il n’y a rien de plus

  1. Aristote, Gouv. d’Ath., Fragm., coll. Didot, t. II, p. 107.