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CH. VI. LES CLIENTS S’AFFRANCHISSENT.

son pécule. La preuve en est que le patron peut lui reprendre tout cela, pour payer ses propres dettes ou sa rançon. Ainsi rien n’est à lui. Il est vrai que le patron lui doit la subsistance, à lui et à ses enfants ; mais en retour il doit son travail au patron. On ne peut pas dire qu’il soit précisément esclave ; mais il a un maître auquel il appartient et à la volonté duquel il est soumis en toute chose. Toute sa vie il est client, et ses fils le sont après lui.

Il y a quelque analogie entre le client des époques antiques et le serf du moyen âge. À la vérité, le principe qui les condamne à l’obéissance n’est pas le même. Pour le serf, ce principe est le droit de propriété qui s’exerce sur la terre et sur l’homme à la fois ; pour le client, ce principe est la religion domestique à laquelle il est attaché sous l’autorité du patron qui en est le prêtre. D’ailleurs pour le client et pour le serf la subordination est la même ; l’un est lié à son patron comme l’autre l’est à son seigneur ; le client ne peut pas plus quitter la gens que le serf la glèbe. Le client, comme le serf, reste soumis à un maître de père en fils. Un passage de Tite-Live fait supposer qu’il lui est interdit de se marier hors de la gens, comme il l’est au serf de se marier hors du village. Ce qui est sûr, c’est qu’il ne peut pas contracter mariage sans l’autorisation du patron. Le patron peut reprendre le sol que le client cultive et l’argent qu’il possède, comme le seigneur peut le faire pour le serf. Si le client meurt, tout ce dont il a eu l’usage revient de droit au patron, de même que la succession du serf appartient au seigneur.

Le patron n’est pas seulement un maître ; il est un juge ; il peut condamner à mort le client. Il est de plus