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CH. III. ABOLITION DE LA ROYAUTÉ.

leur avis, contribuant à composer le vote unique que la gens prononçait, mais ne pouvant pas être d’une autre opinion que le pater. Cette assemblée des curies n’était donc pas autre chose que la cité patricienne réunie en face du roi.

On voit par là que Rome se trouvait dans les mêmes conditions que les autres cités. Le roi était en présence d’un corps aristocratique très-fortement constitué et qui puisait sa force dans la religion. Les mêmes conflits que nous avons vus en Grèce se retrouvent donc à Rome.

L’histoire des sept rois est l’histoire de cette longue querelle. Le premier veut augmenter son pouvoir et s’affranchir de l’autorité du Sénat. Il se fait aimer des classes inférieures ; mais les Pères lui sont hostiles. Il périt assassiné dans une réunion du Sénat.

L’aristocratie songe aussitôt à abolir la royauté, et les Pères exercent à tour de rôle les fonctions de roi. Il est vrai que les classes inférieures s’agitent ; elles ne veulent pas être gouvernées par les chefs des gentes ; elles exigent le rétablissement de la royauté[1]. Mais les patriciens se consolent en décidant qu’elle sera désormais élective et ils fixent avec une merveilleuse habileté les formes de l’élection : le Sénat devra choisir le candidat ; l’assemblée patricienne des curies confirmera ce choix et enfin les augures patriciens diront si le nouvel élu plaît aux dieux.

Numa fut élu d’après ces règles. Il se montra fort religieux, plus prêtre que guerrier, très-scrupuleux observateur de tous les rites du culte et par conséquent fort attaché à la constitution religieuse des familles et de la

  1. Cic., De republ., II, 12.