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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

organisation sociale était discutée et attaquée presque partout. À partir de ce temps-là, elle ne se soutint plus qu’avec peine et par un mélange plus ou moins habile de résistance et de concessions. Elle se débattit ainsi plusieurs siècles, au milieu de luttes perpétuelles, et enfin elle disparut.

Les causes qui l’ont fait périr peuvent se réduire à deux. L’une est le changement qui s’est opéré à la longue dans les idées par suite du développement naturel de l’esprit humain, et qui, en effaçant les antiques croyances, a fait crouler en même temps l’édifice social que ces croyances avaient élevé et pouvaient seules soutenir. L’autre est l’existence d’une classe d’hommes qui se trouvait placée en dehors de cette organisation de la cité, qui en souffrait, qui avait intérêt à la détruire et qui lui fit la guerre sans relâche.

Lors donc que les croyances sur lesquelles ce régime social était fondé se sont affaiblies, et que les intérêts de la majorité des hommes ont été en désaccord avec ce régime, il a dû tomber. Aucune cité n’a échappé à cette loi de transformation, pas plus Sparte qu’Athènes, pas plus Rome que la Grèce. De même que nous avons vu que les hommes de la Grèce et ceux de l’Italie avaient eu à l’origine les mêmes croyances, et que la même série d’institutions s’était déployée chez eux, nous allons voir maintenant que toutes ces cités ont passé par les mêmes révolutions.

Il faut étudier pourquoi et comment les hommes se sont éloignés par degrés de cette antique organisation, non pas pour déchoir, mais pour s’avancer au contraire vers une forme sociale plus large et meilleure. Car sous une apparence de désordre et quelquefois de décadence,