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LIVRE III. LA CITÉ.

chargé des soins de la guerre et de toutes les relations avec l’ennemi[1].

Ni à Rome ni à Athènes l’étranger ne pouvait être propriétaire[2]. Il ne pouvait pas se marier ; du moins son mariage n’était pas reconnu, et ses enfants étaient réputés bâtards[3]. Il ne pouvait pas faire un contrat avec un citoyen[4] ; du moins la loi ne reconnaissait à un tel contrat aucune valeur. À l’origine il n’avait pas le droit de faire le commerce[5]. La loi romaine lui défendait d’hériter d’un citoyen, et même à un citoyen d’hériter de lui[6]. On poussait si loin la rigueur de ce principe que si un étranger obtenait le droit de cité romaine sans que son fils, né avant cette époque, eût la même faveur, le fils devenait à l’égard du père un étranger et ne pouvait pas hériter de lui[7]. La distinction entre citoyen et étranger était plus forte que le lien de nature entre père et fils.

Il semblerait à première vue qu’on eût pris à tâche d’établir un système de vexation contre l’étranger. Il n’en était rien. Athènes et Rome lui faisaient au contraire bon accueil et le protégeaient, par des raisons de commerce ou de politique. Mais leur bienveillance et leur intérêt même ne pouvaient pas abolir les anciennes lois que la religion avait établies. Cette religion ne permettait pas que l’étranger devînt propriétaire, parce qu’il ne pouvait pas avoir de part dans le sol religieux de la cité. Elle ne permettait ni à l’étranger d’hériter du citoyen ni au citoyen d’hériter de l’étranger, parce que

  1. Démosth., in Neœr., 49. Lysias, in Pancleonem.
  2. Gaius, fr. 234.
  3. Gaius, I, 67. Ulpien, V, 4 ; V, 9. Paul, II, 9. Aristophane, Ois., 1652.
  4. Ulpien, XIX, 4. Démosth., Pro Phorm.
  5. Démosth., in Eubul.
  6. Cic., Pro Archia, 5. Gaius, II, 110.
  7. Pausanias, VIII, 43.